C'est une question à plusieurs milliards d'euros qui a été posée ce 8 juin 2021 sur l'antenne de Public Sénat. Dès lors qu'il s'agira de s'allier avec la députée insoumise et le secrétaire général d'Europe Ecologie-Les Verts entre le premier et le second tour des élections des 20 et 27 juin, Audrey Pulvar défendra-t-elle toujours sa proposition-phare ? « Ce sera une condition sine qua non de votre rapprochement éventuel [avec Clémentine Autain et Julien Bayou] ? Vous ne l'abandonnerez pas ? », lui est-il demandé.

Réponse de la cheffe de file de la liste « Île-de-France en commun » : « Ma candidature aux régionales en Île-de-France est un référendum pour la gratuité des transports ». Une proposition qui fait bondir l'actuelle majorité régionale depuis que l'ex-journaliste passée par la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et pour l'homme l'a exprimée.

Écotaxe, éco-redevance et contribution additionnelle à l'IFI

Auteur d'un rapport sur les mobilités en grande couronne, ce dernier appelle à investir dans de nouveaux trajets, à refondre voire à renforcer les offres existantes, à financer l'entretien des ouvrages et à créer des lignes de bus à haut niveau de services (BHNS), c'est-à-dire circulant sur des voies dédiées et sécurisées.

De la même manière que François Durovray défend le retour à l'écotaxe pour les 40% de poids lourds étrangers qui circulent en Île-de-France dont 75% traversent la région sans faire le plein, Audrey Pulvar veut mettre à contribution les transporteurs routiers - la loi Climat et Résilience le permettra - pour 350 millions d'euros ainsi que les entrepôts logistiques des plateformes de commerce en ligne via une éco-redevance et les contribuables franciliens les plus aisés au travers d'une taxe additionnelle à l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) pour 1,1 milliard d'euros.

Sur le modèle de la ville de Paris, la gratuité concernerait en priorité les moins de 18 ans ainsi que les étudiants ou demandeurs d'emplois de moins de 25 ans dès le 1er septembre 2021 pour 124 millions d'euros. Avant 377 millions d'euros en 2022. Coût total dans les cinq ans : 1,9 milliard d'euros. Des montants que la présidente-candidate (Libres !) Valérie Pécresse refuse dans un premier temps d'analyser : « Ce n'est pas à moi de commenter les chiffres de mes adversaires », répond à La Tribune celle qui préside aussi l'autorité organisatrice des transports IDF Mobilités.

L'obligation de passer par la loi

La gratuité des transports en Île-de-France, vraie ou fausse bonne idée ?

Avant de citer 4,1 milliards d'euros de recettes voyageurs chaque année que « les employeurs ne rembourseront plus si les pass Navigo sont gratuits ». « Comment les remplace-t-on ? Si l'école et l'hôpital sont gratuits, c'est grâce à nos impôts. Pour lever 4 milliards de taxes, il faudrait une loi ou que le gouvernement accepte la proposition », déclare Valérie Pécresse.

La région prendra donc en charge la gratuité pour le jeune public en attendant le prochain quinquennat présidentiel et l'élection de la XVIe législature à l'Assemblée nationale. Puis, en septembre 2022, toutes les personnes en situation de handicap et seniors en profiteront pour un total de 589 millions d'euros, avant septembre 2023 pour les chômeurs et bénéficiaires de minima sociaux pour 905 millions, septembre 2024 pour les week-ends, jours fériés et congés scolaires pour 1,435 milliard et septembre 2026 pour tous les Franciliens pour 1,965 milliard d'euros.

A gauche, personne ne reprend la proposition

Après avoir déjà été compensée en partie l'été dernier, la présidente du conseil régional vient en outre de réclamer 1,3 milliard d'euros à l'Etat, dont 300 millions de versement mobilité, pour combler le déficit d'Île-de-France Mobilités du fait de la Covid-19. A l'inverse, pour boucler le budget dédié de 1,9 milliard d'euros, l'ex-président (PS) de la commission des Finances, Maxime des Gayets, parie, lui, sur 400 à 450 millions d'euros supplémentaires de versement mobilité grâce à une demande croissante des salariés. A terme, la co-tête de liste d'Audrey Pulvar à Paris ira discuter avec le Medef.

A gauche, personne - pour l'heure - ne reprend cette proposition à son compte. L'écologiste Julien Bayou veut continuer à investir dans les trajets du quotidien de même que l'insoumise Clémentine Autain vise la gratuité pour les retraités sous condition de ressources au cours de la mandature. Si la députée de Seine-Saint-Denis se prononce « pour l'horizon de la gratuité » à terme, elle développera, en priorité, les transports, notamment de banlieue à banlieue.

2,833 milliards d'euros de recettes voyageurs en 2018

A titre de comparaison, en 2018, l'autorité organisatrice des transports franciliens a perçu 10,464 milliards d'euros de recettes, dont 4,457 milliards de versement mobilité, 2,833 milliards d'euros de recettes voyageurs, 1,85 milliard de concours publics : 1,276 milliard des collectivités membres, 191 millions des départements, 163 de dotations et de compensation de l'Etat, 114 millions de la région et 106 de subventions d'exploitation des départements, communes et intercommunalités. Sans oublier 971 millions des employeurs, 260 millions de publicités, contraventions..., 180 millions d'autres concours publics et 93 millions de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE).

Autrement dit, les ressources se décomposent, en temps normal hors pandémie, à 43% de versement mobilité, à 23% de titres de transport, à 18% de concours publics, à 9% de remboursement des abonnements par les employeurs, à 2% par d'autres recettes et à 1% de TICPE.

Outre 654 millions d'euros affectés aux dépenses d'investissement d'Île-de-France Mobilités, 9,81 milliards d'euros sont dévolus aux dépenses de fonctionnement : à 50% pour la RATP et 31% pour la SNCF, toutes deux chargés d'exploitation et de programmes d'investissement dans le cadre de contrats avec l'autorité organisatrice, mais aussi à 14% pour d'autres opérateurs (bus, transports scolaires) et enfin 5% pour IDFM et ses charges de fonctionnement.

César Armand

6 mn

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